Circonstances
L’auteur. À 51 ans, dont plus de la moitié à la mer, le contre-amiral Le Marant commande depuis deux ans la station stratégique de la Marine royale française à Rio de Janeiro, dans une situation de tension avec les autorités brésiliennes. Au temps du Royaume-Uni de Portugal, Algarve et Brésil, puis aux premiers temps de l’indépendance, les commandants français avaient sympathisé avec les autorités brésiliennes. À partir de 1825, ces hommes sont remplacés par des marins d’un autre réseau de pouvoir, sans doute plus liés, moralement et familialement, à la marine d’avant la Révolution française, alors que leurs prédécesseurs, les C.A. Roussin et Grivel, d’origine bourgeoise, étaient avec le Directeur des Personnels le C.A. Halgan, plus orientés par le principe de mérite que par celui d’hérédité; ce remplacement est sans doute l’effet du règne ultra-royaliste de Charles X en France. Quoi qu’il en soit, Le Marant, dans une de ses correspondances, admet qu’il s’entend bien avec les représentants de toutes les nations, excepté les Brésiliens.
La politique franco-brésilienne. Le Royaume de France a reconnu l’indépendance brésilienne en 1825. Il est représenté au Brésil par un Consul Général, dont le choix a certainement suivi, à l’avènement de Charles X la même année, les inflexions que nous avons notées pour la Marine. Le Marquis de Gabriac a remplacé le comte de Gestas, qui avait été actif et sympathique aux Brésiliens à l’époque de l’indépendance. En conflit avec les Provinces-Unies de la Plata (aujourd’hui Argentine) à propos de la Cisplatine (aujourd’hui Uruguay) que le Brésil occupe depuis 1818, la marine brésilienne a effectué le blocus de la Plata, et capturé des navires de commerce français, neutres, dans des conditions jugées irrégulières par le gouvernement français, qui exige des dédommagements. Ne parvenant pas à un accord d’indemnisation par les voies diplomatiques, le Ministère envoie au printemps 1828 une division navale commandée par le Contre-Amiral Roussin pour appuyer ces demandes par des menaces effectives afin d’obtenir une “convention”. Alors que Le Marant attend cette relève qui l’enverra pour sa prochaine mission dans le Pacifique, éclate la révolte des soldats allemands et irlandais. Roussin arrivera le 5 juillet. Sans doute, sa connaissance du pays, autant que la démonstration de force, aidèrent à la conclusion des négociations.
Le peuple contre les révoltés. Les témoins de la révolte et de sa répression mentionnent une intervention populaire contre les révoltés. Le rapport de l’amiral ne contient aucune allusion à de tels faits. Il est clair que, tout en servant par principe et par politique les intérêts de l’Empereur Pedro I, le détachement des marins français ne devait pas s’impliquer par trop directement. Aussi bien, le détachement de marins français ne débarqua-t-il probablement qu’alors que ces épisodes avaient déjà eu lieu, et resta entre la place du Palais et l’Arsenal de la Marine, en secteur calme, avant d’aller à St. Christovam, certainement par bateau, puisque le Campo de Santana où étaient les révoltés irlandais se trouve sur la route par voie de terre, et il est invraissemblable que les rapports des officiers français ne l’aient pas mentionné, s’ils y étaient passés.
Voir aussi synthèse et documentation.
Rapport du C.A. Le Marant
Notre transcription respecte l’orthographe et les coupures de ligne du manuscrit original, conservé aux Archives Nationales, Archives de la Marine, BB/4/ 506, Campagnes 1828.10 Amérique du Sud.
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A bord de la frégate la Surveillante en rade de Rio Janeiro, le 14 juin 1828
Monseigneur,
Le 11, la Surveillante avait toutes ses dispositions faites pour pouvoir prendre la mer le lendemain, ainsi que par mon dernier rapport j’avais eu l’honneur de rendre compte à Votre Excellence que j’en avais l’intention, pour me diriger vers le grand océan, conformément aux ordres qu’elle venait de me faire parvenir par la frégate la Nymphe.
J’étais descendu à terre sur les huit heures du soir pour prendre congé de M. le Marquis de Gabriac qui me fit connaître dès en entrant, qu’il venait de m’écrire il y avait quelques minutes et de me faire passer une Note de M. le M.is d’Aracaty Ministre des Affaires étrangères, [note 1] qui l’informait que des troupes Irlandaises et Allemandes étaient en pleine insurrection et avaient massacré plusieurs de leurs officiers; et que S. M. L’Empereur nous demandait l’assistance de nos troupes pour ramener à l’ordre ces insurgés.
Je m’en retournai de suite à bord pour donner des ordres en conséquence, et je reçus un instant après, par un des aides de camp de l’Empereur, une note qui m’était directement adressée de son cabinet, par la quelle on me renouvelait la demande des troupes qu’il nous serait possible de mettre à terre pour agir contre les insurgés.
J’ai l’honneur d’adresser ci-joint à Votre Excellence la copie de cette Note en conséquence des quelles j’ai pensé devoir agir.
Je fis descendre les trois compagnies du 13e équipage embarquées à bord de la Surveillante, une compagnie du 32e de la frégate la Nymphe, et la compagnie du 9e de la corvette de charge le Lybio; formant un effectif de 500 hommes [note 2] dont je donnai le commandement supérieur à M. le Capitaine de Frégate de Rabaudy commandant le Lybio. Je dirigeai moi-même ces troupes à terre, et je les fis mettre en bataille sur la place du Palais, où j’appris que M. le Ministre de la Guerre était à l’arsenal de terre. Je me rendis près de lui et je l’informai que j’avais 500 hommes à sa disposition. Il me pria de les diriger sur l’Arsenal de la Marine, ce que je fis. J’y rencontrai le Ministre de la Marine auquel je remis les 500 hommes de mon équipage, où ils prirent position. Sur les deux heures du matin je retournai à bord de la Surveillante. Peu de tems après je fus informé que l’Empereur avait demandé mon équipage au château de S.t Christophe, et qu’en conséquence ils s’y étaient rendus.
Voici, Monseigneur, ce qu’était cette insurrection et ce qui a paru la causer. J’ai eu l’honneur d’informer Votre Excellence dans mes anciens rapports qu’il était arrivé au Brésil plusieurs bâtiments chargés de recrues Irlandaises. Ces Irlandais qui depuis leur arrivée avaient montré en eux la lie des hommes de leur pays, par leur inconduite, avaient été placés, une partie tout-à-fait à l’une des extrémités de Rio Janeiro, vers l’entrée, Praia Vermelha, l’autre partie, à celle qui lui était opposée, dans des casernes au Campo S.te Anne. Un bataillon de six ou huit cents Allemands que commandait M. le chevalier de Thon, était caserné à une couple de portées de canon du château de S.t Christophe, que l’Empereur habite le plus ordinairement avec sa famille, et faisait le service de ce château.
Dès le 10, il se manifesta de la rumeur, en même tems, parmi les Irlandais dans les deux positions où ils se trouvaient, ainsi que parmi les Allemands. Les premiers, du 10 au 11, massacrèrent leur Major sous le prétexte qu’il les volait et qu’il le maltraitait, et l’insurrection parmi les Irlandais du Campo S.te Anne, fut portée à son comble. L’on fit agir contre eux et leur caserne, dans laquelle ils se défendaient, du canon et tous les moyens de force dont on pouvait disposer; et ce ne fut que le lendemain matin après en avoir tué une centaine, qu’on put parvenir à se rendre maître des autres. En même tems que cette insurrection avait lieu parmi les Irlandais, les Allemands casernés près de S.t Christophe, avaient tué deux de leurs officiers, forcé le colonel de Thon qui les commandait à prendre la fuite pour éviter le même sort, ainsi que la plupart des officiers; sous le prétexte qu’on venait de maltraiter un de leurs camarades, dans la punition d’une centaine de coups de bâton que venait de lui faire infliger le major du corps; qu’ils étaient généralement maltraités, qu’on ne gardait pas près d’eux ce qu’on leur avait promis, et qu’on venait d’accorder aux Irlandais, pour les fixer au service du Brésil, des avantages qu’ils n’avaient pas. Ils voulaient imposer l’obligation de congédier d’après des conditions qui leur avaient été faites, ceux de leurs camarades qui avaient fini leur tems de service, que l’on fît à ceux qui resteraient les mêmes avantages qu’aux Irlandais, et qu’ils ne seraient plus commandés que par des officiers allemands.
Voilà la situation où se trouvaient les choses, lorsque nous nous trouvions au château de S.t Christophe, où je m’étais rendu avec M. le Marquis de Gabriac pour continuer l’offre de nos services à l’Empereur.
L’Empereur, laissant à nos marins, en plus grande partie, la garde de son château et de sa famille qui s’y trouvait, puisque nous étions la seule troupe à y être, avec la garde habituelle des Allemands qui n’avaient pas pris part à l’insurrection des casernes, par le seul motif sans doute qu’ils ne s’y trouvaient pas; était parti dès le point du jour pour faire embarquer les Irlandais du campo S.te Anne.
Les Anglais avaient débarqué leurs troupes, le 12, au point du jour, formant à peu près 200 hommes qui vinrent également à S.t Christophe.
Vers le midi, l’Empereur revint à son château et de ce moment on s’occupa du moyen de réduire les insurgés allemands. Nos marins, d’après l’ordre de l’Empereur, marchèrent sur deux colonnes, une pièce de canon en tête de chaque compagnie, et furent prendre position à une petite portée de fusil des casernes des Allemands. Les Anglais conservèrent leur position dans la cour du château, en attendant le résultat de la sommation que l’Empereur fit faire aux insurgés de mettre bas leurs armes devant les troupes avancées qui se composaient, comme je viens d’avoir l’honneur d’en rendre compte à Votre Excellence, de nos Marins, des Artilleurs Brésiliens manœuvrant les quatre pièces qui marchaient en tête de nos compagnies, et d’un escadron de cavalerie Brésilienne. Les Allemands vinrent par compagnie mettre bas les armes devant le front de nos marins et de cette manière se termina cette insurrection.
Je m’étais porté avec M. le M.is de Gabriac parmi nos marins et nous nous en revenions, après avoir vu les Allemands mettre bas les armes, au château de S.t Christophe, lorsque nous rencontrâmes l’Empereur venant à cheval à la tête de son état-major, qui eut la grande bonté de mettre pied à terre pour causer avec nous. Il nous dit les choses les plus obligeantes et me témoigna le désir de conserver nos marins et de les maintenir dans la position qu’ils occupaient pour surveiller la conduite de ces Allemands qui bien que désarmés pourraient se porter dans les campagnes environnantes et y commettre beaucoup de désordres; ce qu’ils avaient fait la veille dans tout ce qui avoisinait le château. J’ai cru ne devoir pas mettre d’hésitation à assurer S.M. que nos marins étaient à sa disposition pour tout le tems qu’il voudrait les conserver; ce dont il m’a remercié très obligeament.
Nos marins sont donc restés sur le terrain, toute la nuit, et en présence, tout le tems de l’embarquement des Allemands qui a eu lieu le lendemain au matin; après quoi l’Empereur a ordonné qu’ils fissent leur retour à l’Arsenal de la Marine, où ils ont été réembarqués pour revenir à bord de leurs bâtiments.
Cette insurrection, à laquelle je ne pense pas qu’on puisse donne dans cette circonstance aucun motif politique, [note 4]
pouvait pourtant devenir très facheuse pour le pays, s’il s’était établi entre ces trois corps d’insurgés la moindre communication. C’est la crainte qu’on a dû en avoir, quand on s’est vu dans l’obligation de mitrailler les Irlandais qui se trouvaient dans les casernes du campo S.te Anne en même tems qu’on savait l’insurrection de ceux qui se trouvaient à la Praia Vermelha, et qui avaient déjà massacré leur major; surtout d’après l’insurrection des Allemands qui étaient les troupes sur les quelles l’Empereur avait pu croire pouvoir compter dans toutes les circonstances jusqu’à ce moment.
Enfin cette insurrection est entièrement terminée dans toutes les parties; les insurgés désormais ont été placés dans différents lieux, l’autre côté de la Baie, sous la surveillance de bonne et sûre escorte. Je ne sais quel parti le gouvernement prendra à leur égard, mais l’Empereur doit surtout regretter, et peut-être plus particulièrement en ce moment, la défection de ce bataillon allemand, sur la fidélité duquel il pensait pouvoir compter et peut-être pour en imposer et maintenir les démagogues de ce pays, qui, dans ces derniers tems, cachent assez peu leurs prétensions. L’Empereur paraît généralement aimé de ses peuples et particulièrement de ceux des provinces du sud; mais les Députés de celles du Nord, qui sont réunis à la chambre dans la présente session, disent bien hautement que le gouvernement qui peut le mieux convenir au Brésil, est un gouvernement fédératif, dans lequel chaque province s’administrerait isolément. Cela paraît être l’esprit général des provinces du Nord, que leurs députés ne prennent guère la peine de dissimuler dans ce moment. A quels troubles pareilles maximes ne peuvent-elles pas conduire le Brésil, si le gouvernement n’y met point ordre à tems?
Lorsque j’ai pensé que je devais faire débarquer les équipages des bâtiments du Roi, sur les demandes que m’en faisait faire l’Empereur, j’ai cru que je ne devais pas marchander sur les services qu’on pouvait leur demander au nom de S.M.I., et je n’avais donné pour instructions à M. le Capitaine de frégate de Rabaudy d’obéir à tous les ordres qui émanaient de l’Empereur. J’ai l’honneur de faire cette réflexion à Votre Excellence, parce que, me trouvant au château de S.t Christophe avec le capitaine du V.au anglais le Gange, qui dirigeait la colonne de ses troupes, il me dit qu’après être débarqué à l’Arsenal de la Marine, le Ministre de la Marine lui avait demandé à faire prendre position à ses troupe à la Gloria, point en dehors de la ville intermédiaire entre les deux lieux où se trouvaient placés les Irlandais, et qui pouvait en empêcher la communication; qu’il lui avait répondu que d’après ses instructions il ne pouvait agir que pour la sûreté personnelle de S.M. l’Empereur. Pareille proposition m’avait été faite par le Ministre de la Marine, avant que l’Empereur eut appellé près de lui nos marins, et j’avais cru devoir ne pas y mettre d’opposition, ne voyant pas trop d’ailleurs la distinction à faire et que ce ne fut pas moins servir pour la sûreté personnelle de S.M. l’Empereur, du moment où c’était agir contre des insurgés qui la menaçaient. De pareilles distinctions m’auraient paru inconvenantes dans un service à rendre, et je désire que Votre Excellente puisse approuver l’opinion que j’ai eue à ce sujet.
Ce mouvement que j’ai fait faire aux équipages sous mes ordres est pour moi, Monseigneur, un juste motif de nouveaux éloges que je dois aux officiers et aux équipages, pour la conduite qu’ils ont tenue, qui n’a pas offert la plus petit circonstance de reproche, dans un débarquement fait de nuit avec la plus grande célérité puisque ce n’est que sur les neuf heures que j’ai pu me trouver avoir fait mon retour à bord, pour donner des ordres, et bien que la frégate et toutes ses embarcations mises à bord pour reprendre la mer le lendemain matin et l’équipage couché; l’armement et l’équipement des compagnies et leur mise à terre, s’est faite en une heure, et à dix heures ils étaient en bataille devant le palais de l’Empereur. Ce grand ordre qui a existé en tout, pour un mouvement aussi célére, et la bonne conduite de tous le monde, doivent être justement attribués au zèle et à la conduite des officiers, remarquables même dè les premiers moments de la création de nos marins en équipages de ligne, et qui nous a mis dans cette circonstance en présence de troupes étrangères sans doute plus anciennement organisées que nous (l’Infanterie de Marine anglaise), sans qu’il ait été possible de faire aucune distinction à l’avantage de cette dernière pour l’ordre qui a existé; et nos marins pourraient même se flatter d’avoir obtenu de l’Empereur du Brésil une distinction de bien grande confiance, puisque dans le moment le plus épineux de réduction des Allemands, ce sont eux qu’il a désiré mettre en avant. Je dois un éloge particulier à M. le Capitaine de frégate de Rabaudy pour la manière dont il a conduit le corps qu’il avait sous ses ordres. J’en dois également à M. le Capitaine de frégate Trotel, commandant le 13e équipage et la Surveillante pour la très bonne organisation et discipline de son corps, et le soin qu’il a pris en tout de me remplacer dans les ordres qu’il a été nécessaire de donner pendant mon absence du bord; et sur les rapports qu’il m’a constamment fait et ce que j’ai vu par moi-même de la conduite de M. le lieutenant de V.au Cécille ayant, depuis le premier moment de l’organisation de l’équipage commandé la 1ère compagnie, faire le service d’adjudant major à terre, et celui de second de la frégate commandant dans ces dernières circonstances les trois compagnies du 13e. Cet officier, dans tous ses services, a mérité d’être remarqué, et mérite également cette distinction dans la qualité qu’on peut désirer d’un officier de mer et du plus grand zèle. Je dois donc comme une chose de toute justice solliciter la bienveillance particulière de Votre Excellence, en faveur de cet officier pour qu’il soit élevé au grade de capitaine de frégate, toutes ses bonnes qualités le portant à l’honneur d’être appelé au commandement des vaisseaux de S.M.
La corvette la Railleuse est entrée à Rio Janeiro dans l’après midi du 12. M. le Lieutenant de V.au. Law de Claperoux, qui la commande, m’a remis une lettre du général Roussin par la quelle il me témoigne le désir que cette corvette puisse remplacer les vivres et l’eau qu’elle a consommés, pour pouvoir venir l’attendre sous le Cap Frio, avec les renseignements que je pourrai lui donner, ainsi que M. le M.is de Gabriac auquel il en a écrit, sur la situation du Brésil et de nos réclamations. Je pense lui avoir donné tous les renseignemens qui peuvent lui être nécessaires pour pouvoir se guider jusqu’à ce qu’il en puisse juger par lui-même, par la Railleuse qui mettra demain matin sous voile pour l’attendre sous le cap Frio, ainsi qu’il lui en a donné l’ordre.
Je mettrai également demain matin sous voile avec la Surveillante, pour me diriger, conformément aux ordres de Votre Excellence, sur Valparaiso.
Je suis avec un profond respect,
Monseigneur,
Votre très humble et obéissant serviteur
Le contre Amiral
[signé] Lemarant
[note: Notre transcription respecte l’orthographe et les coupures de ligne du manuscrit original; voir archives citées.]
Liens
- Consulta versão do escritor Pereira da Silva (1871, em Português).
- See Reverend Walsh’s account (1830, in English).
- L’évènement raconté par le peintre Debret (1834, en Français).
- Volta para Rego (1968).
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Biographie de l’amiral Le Marant
René Constant Le Marant de Kerdaniel, Officier de marine français, né à Lorient le 10 août 1777, mort à Paris le 4 octobre 1862.
Son père était dans l’administration de la Marine. Il embarqua à 13 ans, fin 1790, sur la gabare le Rhöne, qui fit naufrage sur les rochers du Touliguet; l’équipage parvint à se sauver et fut secouru après avoir passé vingt-sept heures sur un îlot rocheux. Le jeune Le Marant passe ensuite sur la frégate la Réunion, et peu de temps après sur la gabare le Barbot [Vichot dit Barbeau flûte 1782] envoyée transporter des troupes à Saint-Domingue, et qui fit naufrage aux Antilles. Il revint à Lorient le 25 juin 1793 et reprit ses études. Il passa l’examen d’Élève de 2° classe le 1 mai 1794 et embarqua sur le vaisseau la Montagne, portant le pavillon du vice-amiral Villaret de Joyeuse. Il participa au combat du 13 Prairial an II et y gagna le grade d’Élève de 1° classe. Il passa ensuite sur la frégate la Fraternité sous le CA Nielly.
En 1796 on lui confia le commandement du lougre la Surveillante, ancien corsaire anglais. Nommé Enseigne de Vaisseau le 7 juillet 1797, il passa sur la frégate la Sirène expédiée à Cayenne, au retour prend le vaisseau de la Compagnie des Indes anglaise Calcutta. Le Marant, chargé de convoyer la prise, fut pris en chasse et capturé par les Anglais, à la suite de quoi il passe quatre mois en détention sur un ponton à Chatham avant d’être renvoyé en France sur parole. Il sera libéré de son serment par la paix d’Amiens en 1802.
Il reçoit alors le commandement de la corvette le Berceau partant pour la Martinique. En 1803, il est envoyé à l’Île de France porter à l’amiral Linois la nouvelle de la reprise des hostilités. Il reste dans la mer des Indes jusqu’en août 1804 et rentre en France. Il apprend à son retour sa promotion à Lieutenant de Vaisseau le 26 octobre 1803.
À la fin de 1804, il embarque sur le vaisseau le Héros, sur lequel il participe à la bataille de Trafalgar.
Nommé Capitaine de Frégate en juillet 1808, il est aide-de-camp du ministre Decrès, puis en 1809 il commande la frégate l’Astrée qui se rend à l’Île de France pour y rejoindre Hamelin. Il participe au combat de la baie de Grand-Port puis avec Decaen commandant l’Iphigénie, frégate prise aux Anglais, l’Astrée et le brig l’Entreprenant ainsi que la corvette Victor, il part croiser sous Bourbon. Le 20 septembre 1810 il rentre à l’Île de France après avoir pris l’Africaine. L’Île de France capitule le 29 novembre 1810, aux termes de la capitulation les soldats et marins français sont rapatriés sous pavillon parlementaire par les Anglais.
Le Marant a été nommé Capitaine de Vaisseau le 20 décembre 1810. Le 1 février 1813 il reçoit le commandement du vaisseau Marengo. À la première Restauration, le bâtiment est chargé de transporter aux Antilles les troupes qui vont reprendre possession de la Martinique et de la Guadeloupe. Il rentre à Brest le 1 mai 1815, et n’accepte aucune responsabilité pendant les Cent-Jours, ce qui n’empêche pas soit mis en disponibilité jusqu’en 1817.
Il reçoit alors le commandement du vaisseau Hector.
Il commande ensuite la frégate Cléopâtre, à la station des Antilles sous le C.A. Duperré.
En 1823 il commande la frégate la Guerrière et croise sur les côtes de l’Espagne (pendant l’invasion du pays par les français afin d’y rétablir la monarchie absolue) ; le 9 août détaché avec la Galathée devant Algésiras, participe au combat et à la prise de la ville ; revient devant Cadix où il prend part aux combats ; à l’issue de la campagne il est nommé Contre-Amiral et baron pour sa conduite.
En 1826 il commande la station du Brésil et des Mers du Sud sur la Surveillante; il quitte Rio de Janeiro alors qu’arrive l’escadre dirigée par le Contre-Amiral Roussin pour exiger des réparations de la part du gouvernement Brésilien pour la saisie de navires français lors du blocus de la Plata. Il reste dans les Mers du Sud jusqu’en 1829.
Préfet maritime de Cherbourg en 1831; VA le 22 janvier 1836; membre puis vice-président du Conseil de l’Amirauté, 1842; versé dans la réserve en 1845 [à l’âge légal], il meurt à Paris le 4 octobre 1862.
Légion d’Honneur (ch. 1810, off. 5 jul 1820, comm. 4 oct 1823, gr.of. 30 oct 1829)
Chevalier de Saint-Louis 14 aout 1814.
Sources: ABF I.640 297-300 : Goepp & Manoury; id., 301 Granges; II.408 Taillemite.
Notes
[note 1] João Carlos Augusto de Oyenhausen Gravenburg, vicomte et marquis de Aracatí (Lisboa,1777-Moçambique 1838) - Gouverneur du Ceará de 1803 à 1807, puis du Mato Grosso jusqu’en 1817, et de la province de São Paulo de 1819 à1821. En 1821 il fut acclamé président de la junte de gouvernement pauliste. Après la révolte de 1828, l’empereur Pedro I renvoya le Ministre de la Guerre, et les autres ministres démissionnèrent en solidarité, sauf lui. En 1836, il fut nommé gouverneur du Mozambique.
Sources: Larousse Cultural Brasil; http://www.resenet.com.br/ahimtb/c3d.htm.
[note 2] Le C.F. de Rabaudy a écrit lui aussi un rapport, annexé à celui de son chef, où il ne donne aucune information, mais fait l’éloge de ses subordonnés, soulignant que malgré l’absence de ravitaillement, “aucun marin n’est sorti du rang”.
[note 3] Le ministre de la guerre, Francisco Vilella Barbosa, visc. et marquis de Paranaguá, né à Rio de Janeiro en 1769, mort dans la même ville en 1846. Militaire, formé en Mathématiques par l’université de Coimbra; prof. à l’Académie Royale de Marine; député aux Cortes de Lisbonne qui réclamèrent une monarchie constitutionnelle, provoquant indirectement l’indépendance du Brésil. Il rentra au Brésil en 1823, comme lieutenant-colonel du Génie. Il fut ministre de l’Intérieur, de la Marine, et de la Guerre jusqu’à la révolte de 1828. Walsh 1830 le désigne comme un de ceux qui travaillaient secrètement à pousser à bout, puis à aggraver la révolte et la répression afin de se débarrasser d’une armée trop liée à l’empereur et sans attaches avec le pays; voir plus haut. Par la suite il fut ministre des Affaires Étrangères, et président du Sénat. Sources: Larousse Cultural Brasil.
[note 4] Ce n’est pas l’avis de Walsh (1830): au moment où le projet [d’organisation de régiments étrangers] fut adopté par le gouvernement, il éveilla la suspicion du peuple… (extrait citant la méfiance populaire envers l’amalgame des Brésiliens avec des étrangers).
D’ailleurs Le Marant se contredit quelques lignes plus bas, en mentionnant les “démagogues”.
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